28.3.07

La République interdit les accouplements royalistes


"Tout a commencé le 27 janvier 2001, lors d'un colloque organisé à Biarritz, raconte-t-il. D'éminents juristes y firent observer que l'article premier, alinéa 1, du Code civil, indiquait toujours que les lois sont exécutoires après promulgation par le Roi. Le texte, modifié en 2004 seulement, était resté inchangé depuis la Restauration. Il en résulte que tous les textes législatifs et constitutionnels qui ont été votés depuis lors, mais n'ont pas été promulgués par un Roi, sont juridiquement invalides - y compris la Constitution de 1958. Juridiquement, la France est donc toujours une royauté et, malgré l'apparente vacation du trône, tous les gouvernements qui se sont succédé depuis 1848 sont des gouvernements de fait !"

En vertu de quoi, le 18 octobre 2001 à 18 heures précises, Me Fortabat-Labatut et son épouse créent, en direct sur les ondes de Radio Ici et Maintenant, le Gouvernement Provisoire de la Monarchie Française (GPMF). Le but de l'association "est le respect des lois en vigueur, françaises et internationales", à commencer par le Code civil "dans sa dernière édition en vigueur à la date de la création de la présente association".
Les fondateurs du GMPF font valoir qu'ils ne peuvent être poursuivis pour usurpation de fonction, puisque: "Ou la France est une république et dans ce cas ils ne s'attribuent aucune fonction de gouvernement de la république, puisque l'association s'appelle Gouvernement provisoire de la monarchie française. Ou la France est juridiquement une monarchie, et alors il convient que les autorités légales de la monarchie se signalent au GPMF, qui s'enlèvera aussitôt son nom dès que sera reconnue officiellement la forme monarchique de la France."


Cette imparable logique a malheureusement échappé aux magistrats de la République. Le 15 mai 2002, le procureur de la République de Bayonne, Claude Bosc, saisit le tribunal de grande instance. Et le 17 mars 2003, cette juridiction ordonne la dissolution de l'association, assortie de la fermeture de ses locaux et de l'interdiction de réunion de ses membres.

Les époux Fortabat-Labatut font appel de cette décision, changent le nom de leur association en Groseille Pomme Mandarine Framboise (GPMF) et font notamment valoir: que l'association n'existe pas juridiquement, les services de la sous-préfecture de Bayonne s'étant opposés à la publication au Journal officiel; que l'interdiction faite à ses deux seuls membres de se réunir viole l'article 215 du Code civil, qui oblige les époux à une communauté de vie; et que la loi de 1901, sur laquelle le tribunal de Bayonne s'est fondé pour les condamner, n'est pas applicable... faute d'avoir été promulguée par le Roi!

Hélas! La pertinence de ces arguments n'entame pas l'impavidité des juges de la cours d'appel de Pau, qui, le 23 janvier 2006, confirment le jugement de première instance au motif que l'association Groseille Pomme etc. "porte atteinte à la forme républicaine de gouvernement". Marianne n'aime pas la salade de fruits!

Et maintenant? Les sourcilleuses autorités de la République mettront-elles leurs pandores en faction devant la porte de la chambre conjugal pour vérifier que Me Fortabat-Labatut ne partage plus le lit de sa moitié? Et s'il se conforme à la décision des juges de Pau, ne sera-t-il pas susceptible d'être poursuivi pour abandon de famille?

"Ce sont de bonnes questions, que je me pose aussi", répond l'intéressé, qui fait remarquer que si d'aventure la présidente de Groseille Pomme etc. attendait un cinquième enfant, cette naissance lui serait imputée en vertu de l'adage "Pater id est quae nuptiae demonstrant": "Comment échapperais-je alors à l'accusation d'avoir enfreint l'interdiction de réunion des membres du mouvement?"

N'en déplaise aux magistrats palois, Philippe Fortabat-Labatut et son épouse ne renoncent pas à la vie de famille. Ils comptent se pourvoir devant la Cour de cassation, puis devant la Cour européenne des Droits de l'Homme s'il n'obtiennent pas justice.
De son côté, le gouvernement de la République a modifié, en 2004, l'article premier du Code Civil. Sait-on jamais?...

- Pierre-Jean Rivière; in Le Choc du Mois n°1 -


1 commentaire:

Anonyme a dit…

Un peu spécieux le raisonnement d'origine: le code civile a une valeur législative donc infra-constitutionnelle: la Constitution n'a donc pas à s'y conformer.