Cela fait des années que je me répète intérieurement qu'il faut que je rédige mes souvenirs politiques: il faut dire qu'ils sont nombreux, depuis ce jeudi 24 juillet 1980, 25 ans aujourd'hui, où j'ai acheté pour la première fois un journal royaliste, Aspects de la France, alors sous-titré l'hebdomadaire de l'Action française. C'est d'ailleurs ce sous-titre qui m'avait accroché l'oeil, quelques jours auparavant, chez ce même marchand de journaux de la petite cité balnéaire de Saint-Lunaire, non loin de Dinard. Mais j'avais attendu ce jeudi 24 pour l'acheter, alors que je faisais du vélo avec un ancien camarade de classe, Vincent Colliaux.Dès le lendemain, je rédigeais une lettre pour acheter des autocollants de promotion d'Aspects de la France, lettre à laquelle je joignais un billet de 10 francs et que je glissais dans la boîte aux lettres de la poste de Saint-Lunaire dès le samedi 26. Coïncidence étrange: c'est ce même samedi que le destinataire "officiel" de cette missive, Pierre Juhel, fondateur de la Restauration Nationale en 1955 (mouvement chargé de la "propagande royaliste et d'Action française"), décédait...J'achetais à nouveau Aspects le jeudi suivant: la photo de Pierre Juhel et l'article annonçant sa mort étaient encadrés de noir. C'est sur la promenade de la plage de Saint-Lunaire surplombée par le golf que je lus ce numéro, devant le regard parfois suspicieux de quelques badauds.Je crois que c'est dans cette semaine-là que je faisais mon premier graffiti "vive le roi", toujours à Saint-Lunaire, sur une affiche publicitaire: c'était le premier d'une très longue série, pas encore achevée à ce jour...
Quelques jours après avoir écrit à l'A.F. pour commander des autocollants de promotion d'Aspects de la France, je recevais, en plus de ceux-ci, une lettre du secrétaire général des étudiants d'AF, Hervé Dulac, accompagnée d'un exemplaire de "L'Action française étudiante". Celle-ci titrait en couverture "Militer à l'Action française" et était illustrée par une photo de jeunes portant un drapeau tricolore à la fête de Jeanne d'Arc. Personnellement, je n'étais pas un fervent particulier de la Pucelle d'Orléans mais j'ai vite constaté combien elle avait d'importance dans les milieux monarchistes maurrassiens, parfois de façon un peu exagérée à mes yeux... J'avais l'impression que la politique, ce n'était pas que des commémorations ou des invocations permanentes (et impuissantes...) à la Sainte de la Patrie.En tout cas, Dulac me précisait, en quelques lignes, les objectifs de l'AF et signalait, me semble-t-il, les différences avec l'extrême-droite européiste (l'eurodroite était alors le cheval de bataille du Parti des Forces Nouvelles, alors très actif).Mais c'est la rencontre avec Jean Chollet, alors responsable de la "Restauration Nationale" pour la région Ouest, qui allait, au-delà de la réflexion intellectuelle, s'avérer déterminante pour mon engagement militant. Il n'avait pas encore 40 ans et était représentant de commerce en spiritueux, je crois, et il venait, parfois tardivement, me voir et discuter politique à la maison, avec l'autorisation de ma mère, pourtant "réservée" envers le militantisme politique... De plus, Jean Chollet, qui avait vite repéré que j'étais tenté par une forme d'activisme plus romantique que politique, organisa des cercles d'études à Rennes, près de la gare: le premier eut lieu en présence de "Pierrot" Philippeau, personnalité attachante de l'AF (décédé au printemps 2006), et de François Pascaud, professeur à Paris et frère de Bernard, responsable des royalistes bordelais.Auparavant, j'étais allé à Nantes suivre, le samedi après-midi, quelques cercles d'études dans le local royaliste, baptisé "Centre Pierre Juhel", en présence de Bernard Pascaud. C'est aussi à Nantes que j'assistais à ma première galette des rois organisée par l'AF: Pierre Sergent, ancien dirigeant de l'OAS qui avait été protégé par l'AF et "Guillaume" (pseudonyme de Pierre Juhel pour ses activités clandestines d'"Algérie française"), y dénonçait la candidature de Michel Debré à la présidentielle du printemps 1981. J'y rencontrais, là aussi pour la première fois, Pierre Pujo, directeur de l'hebdomadaire "Aspects de la France".Dans le même temps, j'avais commencé à vendre "Aspects de la France", tous les dimanches matins, devant les églises du centre-ville de Rennes: ma première vente eut lieu devant la cathédrale, sans doute au mois d'octobre 1980, et il me semble me souvenir que mon premier acheteur était M. Lamy, le père d'une camarade de classe de ma Terminale A du lycée Chateaubriand.
- Jean-Philippe Chauvin - via: Souvenirs Chauvin
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