26.2.07

Les royalistes en Mai 1968


Les journées révolutionnaires et les barricades devaient donner un coup de fouet à la "vieille maison". Tout redevenait possible, y compris un surprenant retour de Maurras dans le milieu jeune, noté avec une certaine inquiétude dans le numéro d’Esprit consacré à la révolte étudiante. Pour répondre aux gauchistes, les jeunes militants royalistes étaient en effet les plus armés idéologiquement de toute l’extrême droite. Un jeune avocat, Guillaume P., qui a vécu ces jours de fièvre dans le camp monarchiste, explique:

«Alors que les membres du mouvement « Occident » avaient passé leur temps à se battre contre les « rouges » dans la rue, les militants d’A.F. préféraient se former dans les cercles d’études. Il faut avouer que c’était plus confortable que de vendre des journaux sur le boulevard Saint Michel. Nous passions pour des lâches intellectuels sous prétexte que nous nous battions moins que les autres. En fait, nous ne nous bagarrions qu’à bon escient, et avec plus d’efficacité qu’ « Occident ». Les nuits de mai nous ont trouvés attentifs et nous avons été les premiers à organiser les contre-manifestations de droite, dès le 13 mai et pour toute une semaine. A un moment où les « fascistes » hésitaient encore entre le soutien aux gauchistes, la création de maquis dans le Jura ou le passage dans les rangs des « barbouzes ». Dès ces contre-manifestations de droite, qui devaient être récupérées par les gaullistes, Aspects [de la France] a commencé à être connu: c’était un des seuls journaux à paraître et nous en avons vendu des quantités phénoménales - 300 à l’heure dans certains points de Paris - car tout le monde voulait s’informer.

« En pleine crise révolutionnaire, l’Action française a organisé un cortège à la mémoire de Sainte Jeanne d’Arc... Au cours de l’été qui a suivi, nous avons fourni un effort militant sans précédant, sur les plages et les lieux de vacances. Nous récupérions de nombreux jeunes soucieux d’agir contre le désordre, viscéralement opposés au gauchisme. La rentrée s’est faite dans une intense fièvre militante: tous les lycées de France ont reçu la visite des distributeurs de tracts royalistes, au prix de nombreuses bagarres. De plus, la dissolution du mouvement « Occident » a privé l’extrême droite non maurrassienne de mouvement et de structure d’accueil; nous avons intégré dans nos rangs un grand nombre de jeunes qui, normalement, n’auraient jamais dû y venir, des gens venus de milieux jamais touchés jusque là.

« L’A.F. de l’après-mai était le plus important mouvement de jeunesse anti-marxiste et les gauchistes ne s’y trompaient pas: nous étions la cible de leurs commandos et chaque semaine, les « monarcho-fascistes » et autres « hitléro-maurrassiens » avaient les honneurs de leur presse. Nous faisions peur... Puis, petit à petit, tout est retombé. Les « fascistes » ont lancé le G.U.D., puis Ordre Nouveau, ralliant à leur tour tous les révoltés par le gauchisme et tous les activistes. Certains d’entre nous se sentaient très attirés par les idées proposées par les gauchistes: ils devinaient dans la révolte étudiante des aspirations proches des leurs. Au moment même où d’autres membres de l’A.F. voulaient concurrencer Ordre Nouveau sur le plan de la violence anti-gauchiste, pour retenir les éléments les plus durs [...] »

- in Les rats noirs, Gregory Pons -

1 commentaire:

Anonyme a dit…

J'ai consacré mon mémoire de Maîtrise à "L'Action Française de Mai 68 à mai 71 : du renouveau à la dissidence" (160 pages environ; 6O lignes par page). Il sera bientôt à nouveau disponible dans une version corrigée et augmentée avec des annexes importantes (tracts, courriers, etc. de l'époque). Appel : je cherche des photos et de nouveaux témoignages pour cette publication du cahier d'annexes.